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Georges SAND, la "Dame de Nohant", n'en fut pas moins
parisienne même très parisienne. Au couvent des
Chanoinesses, sur les pentes de la Montagne Sainte
Geneviève, comme GOUNOD, elle connut la
parenthèse mystique de sa vie et, à quinze
ans, elle crut découvrir en elle les signes d'une
vocation religieuse; mais bien vite, elle se tourna vers le
théâtre et joua du Molière. En 1835, elle rencontre Alfred de MUSSET et,
l'année d'après, s'installe rue Pigalle;
CHOPIN occupe un pavillon au fond du jardin. En 1842 elle va
square d'Orléans, au 80 rue Taitbout, CHOPIN la suit.
Dans le voisinage elle retrouve le peintre DUBUFE, futur
beau-frère de Charles GOUNOD et la famille ZIMMERMAN
future belle famille de GOUNOD qui, lui-même, habite
avec sa mère, à quelques centaines de
mètres de là, rue Pigalle. On y trouvait aussi
le pianiste ALKAN -que l'on découvre aujourd'hui- la
TAGLIONI, et enfin Pauline VIARDOT, C'était là
un véritable ermitage d'artistes. La
personnalité de Georges SAND et celle de Joseph
ZIMMERMAN étaient telles que se retrouvait chez eux
tout le monde des arts et des lettres. Georges SAND
écrit:"Sans sortir de cette grande Cour
d'Orléans, nous courons le soir les uns chez les
autres comme de bons voisins de province. C'est une
espèce de phalanstère qui nous divertit".
C'est là, dans ce coin de quartier de Paris que se
noueront et se dénoueront des amitiés
nombreuses et de multiples destinées. Si en 1847,
Georges SAND déménage encore une fois pour
aller rue de Condé, "la cambuse", comme elle dira,
ses amis lui resteront fidèles et Pauline VIARDOT
viendra y faire entendre une Marseillaise nouvelle ! "C'est
moi qui mène tout cela !" écrira-t-elle. On peut penser qu'elle fut sensible au charme et aux dons
de GOUNOD, elle a 48 ans et lui 33. En mars elle
écrit à un ami: "Allez donc trouver GOUNOD, le
nouveau MOZART, le premier compositeur du siècle, le
génie musical qui va ouvrir une nouvelle ère;
je ne plaisante pas. Il est encore à peu près
inconnu. Mme VIARDOT l'a déterré je ne sais
où, et lui a fait faire un opéra: Sapho. J'ai
entendu cet opéra, il me l'a chanté tout
entier chez Pauline. C'est un chef d'oeuvre. C'est grand, c'est simple, c'est
beau comme ce qu'il y a de plus beau" Le 24 octobre, GOUNOD ayant accepté
d'écrire la partie musicale d'une de ses
pièces, elle lui précise ses intentions et le
remercie de sa collaboration: "Je suis contente de vous
devoir quelque chose". Et elle termine: "Eh bien va pour
l'opéra-comique berrichon'". Le 30 octobre, GOUNOD
ayant rempli son contrat, elle lui écrit: "Mon cher
enfant c'est superbe. Rien qu'un fa dièse, un
ré bémol, mais à propos. J'irai
à Paris et vous dirai mon scénario
d'opéra comique. Nous parlerons de cette grande
affaire bientôt". Enfin, le 10 janvier 1852: "Quand
ferons-nous un opéra? Cet été
j'espère. Je me croyais prête à me
donner toute entière à notre projet et je ne
le suis pas. Espérons que vous pourrez venir cet
été vous berrichonner musicalement.
Peut-être que grâce à vous, la musique
dont je suis privée depuis tant d'années
à mon ordinaire, me ravitaillera quelques temps
encore". En effet, CHOPIN était mort à peine
trois ans auparavant. Il n'y aura pas de bientôt, et lorsque le 20 avril
1852 GOUNOD épousera Anna ZIMMERMAN, Georges SAND,
fidèle en amitié, prendra le parti de Pauline
VIARDOT, blessée dans son honneur et son affection
par l'attitude de Charles. Elle s'éloignera de GOUNOD
et plus jamais n'envisagera une collaboration avec celui
dont le comportement avait témoigné d'une
faiblesse de caractère et, pour le moins d'une
maladresse certaine. Nul ne sait ce qu'aurait pu donner la rencontre de ces
deux tempéraments si riches et si
différents. Quand Georges SAND mourra en 1876, TOURGUENIEV écrira:"La mort de Madame SAND m'a fait beaucoup de chagrin. Pauvre chère Madame SAND quel coeur d'or elle avait ! Quelle absence de tout sentiment petit, mesquin, faux; quel brave homme c'était, et quelle bonne femme !".
Jean-Pierre GOUNOD | ||
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